Le naturel dans la traduction littéraire
Vilen Komissarov


Résumé

L'une des principales tâches de la théorie de la traduction est de trouver des critères applicables à la critique de traductions littéraires. Une traduction de ce genre peut être évaluée en fonction de sa fidélité au texte d'origine et de son effet artistique, mais la critique se trouve fréquemment confrontée à des facteurs intuitifs gênant l'analyse objective.

Une bonne traduction doit sembler naturelle au lecteur et se lire comme s'il s'agissait du texte original. Des études expérimentales ont démontré que cette condition est rarement remplie et que, dans la plupart des cas, les lecteurs peuvent distinguer une traduction du texte original. Ils basent probablement leur jugement sur certaines différences linguistiques, considérées comme des erreurs par les chercheurs, et comme des conséquences d'une capacité ou d'un savoir-faire déficient du traducteur.

L'auteur propose que ces différences soient considérées comme objectives et inéluctables. Une traduction doit représenter le texte de départ et ne peut remplir cette fonction que s'il est accepté comme un type de texte particulier, identifiable et différent du texte original. L'étude du langage des traduction devrait faire le tri entre les erreurs du traducteur et les différences justifiables. Une traduction n'est pas naturelle parce qu'elle est absolument identique au texte de départ : une traduction doit être naturelle en tant que traduction. Elle doit être le reflet des critères acceptables de son genre et des conventions sociales de son époque que le traducteur doit avoir présents à l'esprit lorsqu'il définit sa stratégie.