La traduction de la Bible au Pays Basque. Aperçu historique
Jesus M. Zabaleta

Traduction : Ekaitz Bergaretxe

Présentation

Lorsque nous voulons décrire et présenter l'histoire de la traduction de la Bible en basque, elle apparaît aux yeux de celui qui l'étudie comme un enchevêtrement de voies qui nous mène de ses débuts jusqu'aujourd'hui. De temps en temps, ce réseau présente des moments forts, des pics, et ce pour de nombreuses raisons : des moments où ont été faites des traductions de grande importance et de longue haleine. Bien entendu, l'importance peut être due à diverses raisons, différentes les unes des autres.

Il y a toujours eu des traductions qui ont marqué une époque de la littérature basque, qui ont apporté leur marque à une certaine époque ou bien, qui ont été des indicateurs d'une époque entière de la littérature basque.

On pourrait s'avancer à dire que l'histoire de la traduction de la Bible en basque s'est tissée à proximité de ces pics. Chaque grande traduction a eu un effet particulier, parmi d'autres moments de la traduction de la Bible, et plus encore dans la littérature basque en général.

S'il fallait, d'emblée, citer un de ces moments forts, il faudrait commencer par le premier dans l'ordre chronologique : la traduction de J. Leizarraga.

Viennent ensuite, celle du capitaine Duvoisin sous l'impulsion de L. L. Bonaparte et celle de J. A. Uriarte, cette dernière n'étant pas encore publiée dans son intégralité. Ce sont les premières Bibles complètes en basque.

Plus tard, il ne faudra pas oublier celle traduite et publiée par R. Olabide (1958). Conditionnée par une idéologie linguistique, elle est la seule version basque de la Bible que les écrivains basques actuels et les basques d'un certain âge ont eu dans leurs mains (elle était surtout utilisée pour la lecture de l'Ancien Testament et celle du capitaine Duvoisin, publiée par la Biblioteca de la Gran Enciclopedia Vasca était arrivée plus tardivement).

Dans cette même lignée, il convient de citer Urte guziko meza-bezperak (Les vêpres de toute l'année) (1950) d'Orixe, qui servit de modèle linguistique à une bonne partie de la génération encore active de nos jours dans le domaine de l'euskara (la langue basque).

Ensuite, se rencontreront la rénovation de la religion catholique qui suivit le Concile du Vatican II et l'émergence d'un nouveau mouvement politique basque. En ces temps de récupération de la vie basque (une dizaine d'années avant et après 1969, si toutefois il y a du sens à mettre des frontières au temps), de nombreuses traductions à succès de la Bible furent publiées dont, Lau Ebanjelioak (Les Quatre Evangiles) et Salmuak (Les Psaumes), mais surtout, deux projets de traductions de longue haleine étaient lancés : la traduction de la Bible de la Commission Liturgique et la traduction de la Bible inter-diocésaine.

Après cette brève introduction où nous avons vu quels étaient les sommets de la traduction de la Bible en basque, nous allons nous attacher plus lentement et en détail à voir quel a été le cheminement de la traduction de la Bible.

Les critères d'étude

Une étude sérieuse et en profondeur de la Bible Basque ne peut se faire sans une bonne connaissance des croyances du traducteur et des réalités de la traduction. Les croyances du traducteur, parce qu'il faut connaître quelles étaient ses opinions sur son travail : quels critères de traduction il utilisait, les critères les plus courants à son époque, dans quelle intention était faite la traduction, comment se conjuguent et comment se rejoignent la littéralité qu'imposent les paroles du Seigneur au traducteur et la justesse et l'élégance linguistique nécessaire à l'utilisation pastorale ; et la réalité de la traduction : dans quel dialecte a-t-on traduit, quels sont les textes d'origine et les textes complémentaires à partir desquels a été faite la traduction, à quel point les opinions du traducteur sont-elles présentes.

Cela suppose un travail monographique important avant de s'atteler sérieusement à l'histoire de la traduction en basque. Un de ces travaux monographiques, qui a valeur de modèle, est celui publié récemment par Iñigo Ruiz Arzallus dans Anuario del Seminario de Filología Vasca « Julio de Urquijo » : Notas sobre algunas traducciones vascas del Nuevo Testamento (Notes sur quelques traductions basques du Nouveau Testament)[1]. Dans celles-ci, s'appuyant sur une typologie développée par James Barr[2], l'auteur étudie le type de traduction, la loyauté par rapport au texte d'origine des traductions de Haraneder, d'Harriet et de Duvoisin, en se basant essentiellement sur la traduction de l'évangile de Saint Mathieu.

En ce qui concerne le travail qui suit, et devant l'impossibilité de se baser sur des analyses précises des traductions, nous nous sommes appuyés sur les témoignages concernant les traducteurs et les traductions qui ont fait l'histoire de la Bible en basque. Nous nous sommes, en outre, limités au recueil de ces témoignages, à leur classification et à leur confrontation. Ainsi, cet article doit être placé dans les limites que nous lui avons données, et il convient de l'avoir présent à l'esprit, sans oublier que les critères du traducteur peuvent les démentir et que très souvent c'est la traduction elle-même qui démentit. Certes, il arrive souvent que pensant faire une chose on en fait une autre ; cela arrive bien plus souvent en traduction.

Premières traductions de la Bible

La naissance officielle de l'histoire de la Bible en basque commence à La Rochelle en 1571, lorsque Joannes Leizarraga publie Iesus Christ Gure Iaunaren Testamentu Berria.

A cette époque la Bible est traduite en de nombreuses langues d'Europe, sous l'influence des protestants essentiellement.

Jusqu'alors, les chrétiens basques, comme tant d'autres chrétiens qui parlaient d'autres langues européennes, étaient des orphelins de la Bible, sans véritable connaissance directe de la Bible.

Juan San Martin pose la question suivante : « Celle-ci est-elle réellement la première traduction de la Bible en vascon ? » Et il y répond aussitôt : « Oui en tant qu'œuvre imprimée, mais la littérature orale témoigne de l'existence de certaines parties de la Bible traduites en euskara : dans le chansonnier populaire il est fait mention, fréquemment, de passages de Noé, Salomon, etc. Nous trouvons aussi, dans la lecture de Pastorales (théâtre populaire souletin) des passages de Moïse, Joshua, Abraham, Sodoma et Gomorrhe, du Fils Prodige, Saint Jean Baptiste, etc., en plus de quelques mentions des psaumes, épîtres et Evangiles dans les prédications des prêtres[3]»C.

De plus, sous l'influence des prédicateurs, on allait trouver, ici et là, de nombreux passages diffusés oralement.

La Bible, si ce n'est en basque, on la retrouve plus d'une fois en latin au Pays Basque. Entre autres, le roi de Navarre Sancho le Fort (1194-1234) en avait un exemplaire, en latin, et illustré de nombreux dessins de Ferrandus Petri de Funes, réédité en 1970 par l'université de Yale (François Bucher. The Pamplona Bibles. A fascimile compiled from two picture Bibles with martyrologies commissioned by Sancho el Fuerte of Navarra). D. Luis, gouverneur de Navarre en avait deux autres exemplaires en 1361[4].

On soupçonne, par ailleurs, qu'il ait pu y avoir une traduction antérieure de la Bible. Se basant sur un manuscrit de Tomás Fermín Arteta d'Aoiz, M. Artemós-Sarratel disait : «Il y a de nombreux fragments de tel ou tel autre testament qui ne sont pas de cette version (celle de Leizarraga). Nous savons, entre autres, que Tomás Arteta... avait La Passion du Christ, selon Saint Mathieu et Saint Jean où est mise en évidence l'existence d'autres traductions en vascon de la Bible[5]».

Joannes Leizarraga :

Iesus Christ Gure Iaunaren Testamentu Berria (Le Nouveau Testament de Jésus Christ notre Seigneur)(1571)

Nous avons déjà dit qu'un des sommets dans l'histoire de la traduction en basque de la Bible corresponde précisément aux débuts de cette histoire. Pas seulement parce qu'il s'agit de la première traduction, mais parce qu'après celle de B. Etxepare celle-ci est la seconde œuvre littéraire de par sa maturité. « Il est surprenant de trouver dans les débuts de la littérature basque une œuvre aussi parfaitement achevée et aussi adulte » disait I. Omaechevarria dans Euskera[6].

Dans le même sens, Luis Villasante dit : « Les œuvres de Leizarraga sont extrêmement soignées et parfaites. Pour un précurseur, il est étonnant de voir à quel point il arrive a donner l'impression d'une langue aussi normalisée et établie... Il apparaît dans ses œuvres comme un très fin connaisseur de toutes les ressources de la langue qu'il manipule». Puis il ajoute plus loin : «En fait, Leizarraga apparaît sur la scène de la littérature basque comme un géant solitaire, une sorte de monstre, sans ascendants ni descendants»[7].

Arrêtons-nous quelques instants pour dire deux mots de la vie de ce traducteur qui a mérité tant de reconnaissance et d'honneurs : il est né à Briscous, d'après ces déclarations, sans que l'on sache pour autant de qui et quand il est né, vers 1506. Selon Haraneder, il fut prêtre catholique, puis rejoignit l'ordre de calvinistes dans les années 1550-1560. En 1557 il fut nommé ministre d'église. Après avoir traduit puis publié le Nouveau Testament et d'autres textes courts, il s'établit ministre d'église à Labastide-Clairance, où il serait mort entre 1589 et 1601.

Genèse et publication de l'œuvre

A Pâques 1559, Joana d'Albret, reine de Navarre refuse la religion catholique et accepte la reforme de calvinistes. En réponse, les rois de Castille lui prirent toutes les terres du sud des Pyrénées. Elle s'attacha aussitôt à répandre la réforme calviniste sur ses terres. Elle envoya les Béarnais à Genève, afin qu'ils étudient directement avec Calvin. Une partie des grands de Soule et de Basse Navarre étaient avec elle. Le peuple de Soule était lui aussi pour la réforme, mais pas les bas-navarrais.

Veuve depuis 1562, la reine redoubla d'efforts dans sa tâche de réforme. En 1563 le Nouveau Testament était publié en béarnais.

La traduction de Leizarraga faisait partie de ce plan de diffusion de la réforme. Leizarraga se vit confier la traduction du Nouveau Testament, de Prières et du Catéchisme par le synode réuni le 14 mars 1564 à Pau. D'après un document publié par G. Lacombe « pour semployer à La translation du Nouueau testament prières et Catéchisme en Langue Basque ez pour se preparer aservir au Ministere en Ce pays (le Béarn) ou en La basse-Nauuarre »[8].C

Leizarraga se trouva donc devant un travail fastidieux (qui fut bien plus long qui quiconque aurait pu l'imaginer au début)BA et difficile de mener à bien. Dans le présent fait à la reine de Navarre, Leizarraga montre à quel point il est conscient de la difficulté de cette entreprise : « Il s'en est fallu de peu que je renonce à ce travail à peine après l'avoir entamé, lors que je m'apercevais de l'ampleur de la tâche et voyant la stérilité et la diversité du langage dans lequel j'ai écrit : un langage jamais encore utilisé en traduction »BA.

Malgré cela, Leizarraga se mit au travail dès 1564 et la traduction du Nouveau Testament était achevée en 1565, et cette même année un groupe composé de Sanz de Tartas, La Rive, Landetcheverry et Tardets, sur demande du synode du Béarn, commençait les travaux de correction. Deux des quatre correcteurs étaient souletins : Tardets et Landetcheverry.

Le livre traduit en un an allait rester six ans sans voir le jour. Leizarraga s'était rendu à la Rochelle pour surveiller et corriger les travaux d'impression. C'est dans cette ville qu'il dédicaçait l'exemplaire offert à Joana d'Albret reine de Navarre : Rochellan Agorrilaren 22. 1571. (A La Rochelle, le 22 Août 1571).

Nous ne savons pas si le travail de Leizarraga a connu une seule édition ou plusieurs. En effet, d'un exemplaire à l'autre on trouve des différences. Tous les exemplaires ne sont pas les mêmes : les textes supplémentaires publiés avec certains Nouveaux testaments, n'apparaissent pas dans d'autres exemplaires. Larramendi avait eu connaissance d'un de ces derniers : « il semble que l'auteur était calviniste, de par l'époque à laquelle il fît la traduction, de par le lieu où il a été imprimé, de par la liberté qu'il a eue de la faire en langue vulgaire, et de par le fait qu'il dédie cette œuvre à la reine de Navarre, Joana d'Albret, qui vécut et mourut calviniste en 1672. Il n'y a d'ailleurs pas d'autre moyen de savoir si l'auteur, qui à mon avis est très précis dans sa traduction, était calviniste[9]»C. Dans les documents annexes qu'il cite, il ne parle que des livres qui composent le Nouveau Testament.

On peut donc penser qu'il y a bien eu plus d'une édition du Nouveau Testament, et si ce n'était pas ainsi, que l'édition a été modifiée. En effet, Leizarraga était resté à La Rochelle jusqu'en 1673.

Le dialecte de Leizarraga

On ne peut savoir quel était le basque que parlait Leizarraga dans la vie courante, car on ne peut mesurer à quel point son dialecte est reflété par sa traduction. René Lafon dit : « Nous ne pouvons savoir dans quelle mesure la langue des écrits de Liçarrague reflète son parler propre, celui qui était en usage dans sa famille et celui qu'on employait à Briscous, ni dans quelle mesure ces parlers concordaient ou divergeaient, ni à quoi il faut attribuer la présence dans ses écrits de telle ou telle forme souletine, bas-navarraise ou commune à ces deux groupes de parlers[10]»F.

En fait, Leizarraga fut confronté au problème de' dialectes à partir du moment où il fut chargé de traduire le Nouveau Testament et où il posa la plume sur le papier : « de même que pour le reste, chacun sait la différence et la diversité qu'il y a dans la façon de parler d'une maison à l'autre du Pays Basque ; pour cette raison et sans m'éloigner du sens juste, j'ai poursuivi, dans les limites du langage, un langage compréhensible par tous, et pas un langage d'un lieu précis »BA -reconnaît-il dans la préface d'Hevscalduney.

Tous ceux qui ont étudié les textes de Leizarraga s'accordent pour dire que la base du dialecte qu'il utilise est le labourdin, enrichi de nombreuses formes et mots empruntés au bas-navarrais et au souletin. En revanche, pour J. Vinson, la base de la langue qu'il emploie c'est le bas-navarrais.

On fait aussi souvent allusion à l'archaïsme du langage de Leizarraga. Schuchardt dit ceci : « La langue qu'emploie Leizarraga est pour les labourdins et les bas-navarrais au moins aussi lointaine que celle de Luter pour les allemands actuels[11] B.

Il faut ajouter à cette caractéristique celle de son attirance pour le latin. On trouve dans les écrits de Leizarraga, comme dans ceux d'Etxepare, un nombre important de mots! empruntés aux langues romanes, qui sont d'ailleurs souvent des emprunts faits en son temps. Il n'a pas besoin de prétexte pour cela. Les fûts des noces de Cannes étaient appelées kubak J et dans l'œuvre de Leizarraga le « maistre d'hostel » est repris par mestedostal (Jn, 2, 6-9) : « Et se trouvaient là six cuves de pierre placées pour la purification des Juifs, faisant chacune deux ou trois mesures. Jésus leur dit, remplissez les cuves d'eau. Ils les remplirent jusqu'en haut. Alors, il leur dit, prenez-le et apportez-le au maître d'hôtel. Ils le lui amenèrent : et lorsque le maître d'hôtel goutta l'eau devenue vin (il ne savait pas comment : mais les serviteurs qui l'avaient transportée le savaient, eux) il appela son épouse et lui dit...

Nous reviendrons plus en détail sur les emprunts au latin dans la partie concernant les critères de traduction.

L'archaïsme de la langue de Leizarraga est surtout visible dans le système verbal.

Avec ces caractéristiques et les bases qu'il s'était fixées, Leizarraga définissait un nouveau modèle linguistique, utile pour ses traductions, contrairement à Etxepare qui n'utilisait que son dialecte, mais comme une tentative de koinè, sans doute comme dit I. Sarasola : « pour arriver à cela, Leizarraga à pris comme point de départ le dialecte labourdin et il utilisera de nombreux archaïsmes, dans le but de réduire les différences propres à toutes fragmentations linguistiques, qui ont tendance à augmenter avec le temps, mais aussi dans le but d'arriver à une expression révérencielle et distante des textes sacrés[12]»C.

Bien que nous connaissions les paroles écrites dans le prologue Heuskalduney, nous ne pouvons pas affirmer quel est le domaine d'application ou l'objectif de cette koinè, à qui elle est destinée, aux locuteurs de quel dialecte. Il faut se souvenir de ce qu'il dit dans l'Abc : « Et en ce qui concerne cette façon de parler, j'ai eu plus de considération pour les personnes qui habitent des lieux du Pays Basque où la religion est exercée, que pour les autres : et ce, dans l'espoir que cette Instruction allait tout d'abords servir à ceux-làBA». Juan Juaristi se base sur cela pour dire : « Leizarraga ne prétendait pas écrire pour tous les basques, mais seulement pour les sujets de la reine de Navarre (c'est-à-dire pour ceux du versant septentrional des Pyrénées, ce qui, d'une certaine façon, simplifiait le problème), et ce qu'il voulait, ce n'était pas, comme ça a été dit par erreur, une langue littéraire, mais une langue écrite capable d'imposer une norme supra-dialectale et de se constituer en Koinè de la Vasconie d'outre-monts[13]»C.

On pourrait dire que le langage du Nouveau Testament et des textes annexes n'est pas tout à fait homogène. Une des raisons pourrait être que l'attitude pour la traduction n'était pas la même dans le premier que dans les suivants. Mais en plus, il utilise différents dialectes en fonction des textes. Ainsi, nous avons un exemple de déclinaison, celui du cas Nori au pluriel, où dans l'Abc le suffixe est écrit -er, comme en souletin, alors que dans le Nouveau Testament il emploie le suffixe -ey.

Peut-être faut-il voir dans cette dispersion linguistique, en plus de la dispersion qui serait normale et propre à chaque auteur, ce qui est plus fréquent lorsqu'on veut faire une unification linguistique éclectique, la main de ceux qu'il a eus comme correcteurs et superviseurs.

Le texte original du Nouveau Testament

Lorsqu'on lit les différentes histoires de la littérature basque, surtout celle où sont mentionnés les latinismes de Leizarraga on accorde souvent un caractère véridique au fait que Leizarraga a fait sa traduction à partir de la Vulgate. Ainsi, « comme traducteur de Bible, Leizarraga nous donne l'impression d'être très servile et attaché au texte latin[14]»C précise L. Villasante.

Cependant, R. Lafon, suite à l'étude comparative de la traduction de Leizarraga avec des versions françaises de la Bible utilisées par les calvinistes qu'il a faite, a pu déduire que Leizarraga a suivi de très près la traduction faite par Pierre Robert, dit Olivetan, et publiée pour la première fois en 1535; il n'a pas suivi la première version, mais la seconde qui comporte des corrections. Cette traduction est très proche du texte grec. En comparant la traduction de Leizarraga au texte grec on peut se demander s'il ne l'a pas traduit directement de ce dernier. Par contre, lorsque le texte d'Olivetan s'éloigne du texte grec, Leizarraga suit le texte français ; en revanche, presque systématiquement, lorsque le texte français s'éloigne de la Vulgate et se rapproche du grec, celui de Leizarraga aussi suit le texte grec. Cependant, quelques fois, la traduction de Leizarraga suit de très près la Vulgate : lorsque la Vulgate est plus proche du texte grec que celui d'Olivetan.

Ceux qui veulent des exemples peuvent consulter le livre déjà cité de R. Lafon.

On peut donc dire que Leizarraga et ses confrères ont surtout suivi la version française d'Olivetan, mais qu'ils ont quand même tenu compte de la Vulgate et du texte grec.

Les critères qui ont guidé sa traduction

Dans sa traduction Leizarraga suit au plus près le texte d'origine: « Je voudrais dire » —dit Leizarraga dans sa dédicace à la reine de Navarre, et ce n'est pas sans rappeler quelques mots de la fin de l'Apocalypse— « que j'ai toujours eu à l'esprit que Dieu m'a chargé expressément de ne rien ajouter ni enlever de ses paroles, et donc, que je l'ai fait le plus fidèlement possible »BA.

Après la citation mentionnée plus haut sur l'attachement dont faisait preuve Leizarraga pour le texte en latin, L. Villasante ajoute : « Mais ce serait une erreur de penser qu'il le faisait ainsi par ignorance ou maladresse. C'était une question de critère. Le profond respect de la parole de Dieu l'oblige à traduire avec une fidélité et un assujettissement au texte, qui aujourd'hui nous paraît excessive, ce qui est vrai[15]»C.

Pour L. Mitxelena : « Sans doute n'a-t-on pas suffisamment tenu compte des circonstances qui expliquent le caractère excessivement littéral de sa version qui lui a été tant de fois reproché. Tout d'abord, c'était un calviniste qui pensait que la parole de Dieu ne devait pas faire l'objet de paraphrases ni de traductions ad sensum, même s'il pouvait ainsi gagner en simplicité et naturalité : c'est la raison pour laquelle la traduction des textes non bibliques et beaucoup moins restrictive[16]»C.

Ces deux citations résument ce qui est dit sur la façon de traduire de Leizarraga. On a aussi évoqué sa dépendance par rapport au texte d'origine même dans le choix des mots pour la traduction du Nouveau Testament.

Le lecteur peut ressentir cette sensation de dépendance de Leizarraga par la quantité de latinismes qu'il emploie dans son lexique d'une part, et par la longueur de ses périodes d'autre part.

On ne peut nier, en ce qui concerne le lexique, que Leizarraga a beaucoup puisé dans le latin, comme s'il l'avait pris de la Vulgate. Ce fait est par lui-même étonnant, si on considère que pour un ministre protestant la Vulgate n'était en aucune manière plus fiable que n'importe quelle autre version des protestants. Le texte latin n'avait aucune originalité pour ceux qui savaient que c'était une traduction et qui avaient la capacité de se tourner vers les textes originaux.

Or, il ne faut pas oublier, comme nous l'avons vu plus haut, les emprunts des langues romanes (le français et peut-être le béarnais) qu'utilise Leizarraga dans la traduction du Nouveau Testament, des emprunts nouveaux qui n'ont subi entre temps aucune modification morphologique, empruntés par Leizarraga lui-même et qui ne sont pas répertoriés comme faisant partie des emprunts utilisés dans le langage populaire, et qui ne collent pas à l'euskara. De ce point de vue, ils sont tout à fait comparables aux latinismes.

On peut donc douter que les latinismes de Leizarraga soient dus à son attachement au texte d'origine, lorsqu'on voit que celui-ci est généralement une version française du texte grec.

Ce problème des latinismes n'aura pas de solution tant qu'une étude comparative des emprunts de Leizarraga n'aura pas été faite.

Quant à la syntaxe, là nous pouvons affirmer que Leizarraga suit le texte d'origine de près, du moins dans toutes les publications bilingues qui sont disponibles.

L. Mitxelena avait tout à fait raison dans ce qu'il disait, surtout si on étudie la façon de traduire du point de vue du contenu sémantique. La différence est flagrante entre Leizarraga le traducteur biblique et Leizarraga traducteur d'autres textes, en ce qui concerne sa façon de traiter le contenu.

L'attitude de Leizarraga le traducteur biblique est révélée dans un passage de la dédicace dont nous avons déjà parlé. Le traducteur des autres textes nous apparaît dans ceux-ci : la traduction de l'introduction elle-même, et les adaptations qu'il a faites dans d'autres passages. Ainsi, dans la déclaration de Sabbathoaq, il dit : « c'est-à-dire le repos, et nous avons tout de suite eu le même mot, parce que les Evangélistes, lors qu'ils écrivaient en grec n'ont pas changé le mot, même s'il n'était pas de cette langue. Et c'était le septième et dernier jour, qu'aujourd'hui certains nomment 'larumbate', d'autres eguiacoitz et d'autres encore nesquen egun' »BA. La diversité de ce jour de la semaine n'a sans doute pas été traduite du texte original par Leizarraga.

En résumé donc, lorsqu'il traduit le Nouveau Testament, Leizarraga reste très proche du texte d'origine en ce qui concerne le contenu, mais il a une autre perception des autres textes non publiés des révélations de Dieu.

Les éditions du Nouveau Testament de Leizarraga

L'œuvre de Leizarraga a connu d'autres éditions depuis 1571 :

Celle éditée à Strasbourg en 1900 par Th. Linschmann et H. Schuchardt : I. Leiçarraga(s) Baskische Bücher von 1571 (Neues Testament, Kalender und Abc). Une édition comportant une importante introduction de H. Schuchardt.

La maison d'édition Ordago avait publié cette même édition en 1979, sans l'introduction de Schuchardt.

Entre 1903 et 1908 à Londres, il y eut une publication par The Trinitarian Bible Society, sous la responsabilité, semble-t-il, du bascologue Dogson. Rien que le Nouveau Testament.

Ce sont les trois publications les plus complètes.

En plus de celles-ci, il y a eu des publications partielles : l'Evangile de Saint Marc de J. Vinson (1874), l'Evangile de Saint Mathieu, édité par Van Eyes (1877), l'Evangile de Saint Jean et l'Evangile de Saint Mathieu par Dogson (1891-1896 et 1902), le Calendrier publié par Lischmann et Schuchardt (1900) ; ou Euskal Protestantismoa zer zen (Qu'était le protestantisme basque) (Lur, 1970).

Les Evangiles traduits par Leizarraga connurent d'autres éditions à la fin du premier quart du XIXème siècle : en 1825 et 1828, l'Evangile de Saint Mathieu et le Nouveau Testament en intégralité. D'après P. Lafitte, elles furent adaptées par le beraskoiztar (habitant de Briscous) Gaidor, ayant en sa possession le texte de Leizarraga mais aussi celui d'Haraneder. Selon L. Akesolo, trois personnes différentes auraient fait ces adaptations. Quoi qu'il en soit, ces éditions connurent, surtout au Labourd, un succès que celles de Leizarraga n'avaient pas connu.

Les adaptations de la Bible sous le prince Bonaparte

La plupart des tentatives de traduction de l'ensemble de la Bible ou de parties de celle-ci ont été menées par les protestants après celle de Leizarraga. En 1856 le prince L. L. Bonaparte avec la publication de la traduction de saint Mathieu par E. Inchauspé en souletin et Sallaberry Ibarrola en bas-navarrais inaugurait ce que l'on peut appeler dans l'histoire de la littérature basque la « période Bonaparte ».

Pierre d'Urte, J. Haraneder, les adaptation de Gaidor, J. Lizarraga d'Elkano, B. Chaho, le docteur Oteiza et Garibai seront les traducteurs bibliques de cette époque. Certains d'entre eux -la plupart- ne verront pas leur œuvre publiée.

Avec ceux-ci, bien qu'il ne furent pas des traducteurs bibliques, il nous faut citer quelques écrivains qui ont adapté ou traduit des passages de la Bible : B. Larregy, J. A. Ubillos, P. A. Añibarro, F. I. Lardizabal. Leurs adaptations ont comblé le vide de la Bible parmi les catholiques. Nous ne parlerons que de ces adaptations et pas de celles qui allaient suivre. A l'époque où ces adaptations étaient entre les mains des basques, ou lorsque les adaptateurs se sont vus poussés à faire ce travail, ils l'ont fait dans l'espoir de combler ainsi l'absence d'une version catholique de la Bible. Il ne faut pas oublier que ce travail était fait alors que la lutte faisait rage entre catholiques et protestants autour de la Bible —les catholiques désirant que le clergé soit garant de l'interprétation alors que les protestants voulaient la laisser au choix de chaque lecteur.

Ainsi, Testament çaharreco eta berrico historioa (L'Histoire de l'Ancien et du Nouveau Testament) fut publié à Bayonne en 1775 et 1776, en deux tomes, par B. Larreguy, à partir de la version française de M. de Royaumont.

Ayant sans doute pris connaissance du livre de Larreguy, J. A. Ubillos (1707-1789) commença Christau dotriñ berri-ecarlea, une traduction-adaptation du Catéchisme historique de Fleury. Elle fut publiée à Toulouse en 1785 puis en 1897 et 1909.

L'œuvre de Pedro Antonio Añibarro (1748-1830) Lau Evangelioac batera alcarturic (Les quatre évangiles réunis) n'a toujours pas été publiée. Selon L. Villasante il s'agirait d'une traduction des quatre évangiles : « Il faut souligner cette traduction des Evangiles, parce que c'est sans doute la première qui s'est faite dans cette partie du pays[17]»C. Quant aux autres histoires, elles ne font que répéter ce que dit Villasante.

Lorsque Francisco Inazio Lardizabal (1806-1855) écrivit son Testamentu Zarreco eta Berrico Condaira (Histoire de l'Ancien et du Nouveau Testament) il avait déjà eu connaissance des travaux de Larreguy et d'Ubillos. Parmi ces histoires saintes, celle qui fut le plus diffusée et qui connut le plus grand succès, ce fut celle de Lardizabal. Depuis qu'elle fut publiée pour la première fois en 1855 à Toulouse, elle connut trois éditions supplémentaires, en 1887, 1908 et 1957 (la dernière concernant uniquement le Nouveau Testament).

P. d'Urte : un grand projet

Après Leizarraga, le premier traducteur biblique est P. d'Urte, un prêtre catholique converti au protestantisme. Même s'il n'est pas parvenu à publier sa traduction, il mérite que nous nous attardions un peu sur son cas.

Il a laissé trois œuvres manuscrites :

I. Une grammaire de l'euskara Grammaire Cantabrique, qui est surtout intéressante par l'analyse qu'il fait du verbe : « Ce manuscrit est, philologiquement parlant, le plus important des trois, du fait qu'il comporte le premier traité sur le Verbe écrit plusieurs années avant que Larramendi ne publie sa Grammaire[18]»I.

II. Un dictionnaire Latin-Basque : Dictionarium Latino-cantabricum / Dicçionario Latignescára, jusqu'au mot commotus. Pas publié.

III. Biblia Saindua. Testament çahárra eta berríä iduquitçen dituena. (La Sainte Bible. Comprenant l'Ancien et le Nouveau Testament)

Les deux premiers livres semblaient terminés et prêts à être publiés. En revanche, ce troisième était jonché de corrections et il semble que l'auteur n'a pas eu le temps nécessaire pour l'achever. En effet, après avoir traduit la Genèse, la traduction s'interrompt en plein milieu du sixième vers du chapitre XXII de l'Exode.

Il semble, d'après le titre du livre, que P. d'Urte avait l'intention de traduire la Bible en entier. Il faisait partie de ces ministres qui après la révocation de l'Edit de Nantes (1685) avaient fui la France pour se réfugier en Angleterre, et il se pourrait qu'il ait commencé ce travail de traduction sur demande de ses hôtes.

Tous ces écrits datent de 1700.

Quant au langage de d'Urte, il serait un des meilleurs témoignages du labourdin. J. Vinson disait à Llewelyn dans une lettre que « le langage de d'Urte est excellent, clair, agréable, exact et grammaticalement correct, et nettement supérieur à celui de Liçarrague en tant que dialecte[19]»I.

On dirait une traduction faite à la hâte, sans avoir eu le temps de la corriger. Le texte que d'Urte a utilisé pour sa traduction était la version française de Genève comme le démontrent certaines erreurs commises sous l'empressement : il confond «famine» et «femme», il traduit «belle fille», par «alaba ederra»u, il comprend «serf» au lieu de «cerf», etc. «Mais une femme arriva au pays (mais une famine arriva au pays)» (Genèse, 12,10). «Thar prît son fils Abraham, et Lot le fils de son fils qui était le fils d'Aram et Saraï sa belle fille...»B (Genèse. 11,31).

Le Nouveau Testament de Joanes Haraneder

Tout comme Pierre d'Urte, ce Luzien était né vers 1669. Haraneder avait traduit la totalité du Nouveau Testament, bien que dans le titre il ne le dise pas : Jesu-Christoren Evangelio Saindua jaun Haraneder aphez Donibane Lohitsukoac escoararat itçulia (Le saint Evangile de Jésus-Christ traduit en basque par monsieur Haraneder, curé de saint Jean de Luz). C'est la première traduction de la Bible qu'aient faite les catholiques. Comme il le dit dans son avant propos Aitçin-Solhasa, il connaissait la traduction de Leizarraga mais comme cet « ennemi et homme misérable » était « empoisonné par une hérésie venimeuse » sa traduction ne pouvait en être autrement. Il l'avait achevée vers 1740 mais elle dut attendre plus d'un siècle jusqu'à ce que les prêtres Dassance et Harriet ne la publient. Cependant, l'édition est relativement différente du manuscrit d'Haraneder.

Alors que le traducteur était encore vivant, en 1749 et 1750 il publia Philotea de Saint François de Sales et Gudu izpirituala (la guerre spirituelle) de Scupoli, ces deux œuvres ayant été traduites un siècle auparavant par S. Pouvreau.

Bien qu'Haraneder ait traduit l'intégralité du Nouveau Testament, l'édition de 1855 ne comporte que les quatre évangiles. Son texte d'origine était la Vulgate latine qu'il avait suivie « du mieux possible, à la lettre ». Il reconnaît que pour la traduction des passages difficiles il avait utilisé les versions françaises de Maistre de Sancy et de D. Bouhours. Ruiz Arzallus n'est pas du même avis sur la littéralité de la traduction : « Il semble qu'Haraneder traduit les textes sacrés avec une certaine désinvolture, en ce qui concerne le contenu, c'est-à-dire l'information véhiculée par le texte, car, comme nous avons pu le voir, la fidélité à la forme de l'original tend à être nulle. Alors, dire qu'il a suivi le texte de la Vulgate "parfois jusqu'au calqueF» (opinion de P. Lafitte), "pas du tout. Moins encore qu'il l'a suivi de très prèsC" "pas uniquement le sens, mais aussi la lettre, du mieux possible (...) de très près et mot à motBA" (Aveu d'Haraneder lui-même)[20]».

En ce qui concerne la traduction d'Harriet et de Dassance, on a déjà dit qu'elle était très éloignée du manuscrit, jusqu'au point qu'on pourrait dire qu'il s'agit d'une nouvelle version du manuscrit d'Haraneder. Ruiz Arzallus résume son analyse dans ces termes : « En général, comme cela a déjà été dit, Harriet est parti du texte d'Haraneder : celui-ci est toujours le point de référence. Lorsqu'il est en désaccord pour des raisons de pureté lexicale, il a recours à Leizarraga : si celui-ci lui propose une solution acceptable, il l'adopte, sinon, il produit son propre texte, en accord avec ses idées linguistiques. Lorsqu'il s'éloigne d'Haraneder, ses modèles sont Leizarraga et la Vulgate[21]»C.

Lizarraga d'Elkano

Joakin Lizarraga d'Elkano (1748-1835) mourut sans voir publié un seul mot de son oeuvre riche et longue. La forte censure que le Conte d'Aranda avait mise en vigueur, contre toutes les langues autres que la langue officielle, avait fait capoter tous ses projets.

Il était le seul écrivain navarrais de son époque, et il écrivit son œuvre entièrement en haut-navarrais occidental.

Lorsque L. L. Bonaparte commença à s'intéresser à la traduction de la Bible en basque, il reçut les manuscrits des traductions de Joakin Lizarraga d'après les évangiles de Saint-Jean et Saint-Mathieu. Il publia le premier des deux : Jesus-Cristoren evangelio sandua San Juanec dacarren guisara (Le Saint Evangile de Jésus Christ selon Saint Jean) (Londres, 1868). La traduction de l'Evangile de Saint-Mathieu n'a jamais été publiée.

D'autres traductions

En 1838 fut publié à Madrid, sur l'initiative de G. Borrow Evangelioa San Lucasen guissan (l'Evangile selon Saint Luc) traduit par un médecin du nom d'Oteiza. Nous venons d'apprendre récemment qu'Oteiza était originaire d'Albistur. La version en basque a été faite à partir de celle en castillan de B. Scio. Une traduction donc facile et assez fidèle.

Evangelio Saindua San Marken arabera

(Le Saint Evangile selon Saint Marc), publié à Londres en 1887 dans le tome VI de la bibliographie de J. Bilbao[22] serait l'œuvre d'Oteiza.

L'œuvre du prince Bonaparte

Le prince L. L. Bonaparte (1813-1891), déjà fervent amateur de linguistique, arriva pour la première fois au Pays Basque en 1856. Il était arrivé grâce à A. d'Abbadie pour découvrir l'euskara et le monde basque. Depuis, il fit cinq voyages au Pays Basque entre 1856 et 1869. Il établit une liste de plus de 800 œuvres. Il mit en place une équipe de traducteurs afin qu'ils produisirent le matériel nécessaire pour ses travaux linguistiques. Il passa huit années à étudier les résultats obtenus par cette équipe compétente. De temps en temps il amènera certains de ses collaborateurs à Londres, pour plus d'éclaircissements.

Enfin, lui-même apprit l'euskara, il fut traducteur, et on dit que le prince avait appris cette langue « mieux que quiconque ne l'a jamais sue et ne la saura jamais B».

Depuis la publication par ses soins de l'Evangile selon Saint Mathieu traduit par M. Salaberry, dans le dialecte de la Basse Navarre en 1856, L. L. Bonaparte fit 31 publications en euskara de l'intégralité de la Bible ou de parties de celle-ci.

Par contre il ne faisait que des éditions à peu d'exemplaires : certaines à exemplaire unique, ou à deux ou trois exemplaires. Les œuvres tirées à huit, neuf, douze exemplaires sont nombreuses. Les publications les plus importantes en nombre étaient de l'ordre de 250 exemplaires.

Il fit ces traductions, en euskara mais aussi dans d'autres langues, pour les besoins de ses recherches linguistiques. Dans le courant de la linguistique de son époque, il centrait ses recherches sur les considérations d'ordre dialectologique : il voulait étudier la diversité et la séparation des formes linguistiques.

Voilà pourquoi des tirages à si peu d'exemplaires. D'autre part, afin que les textes pussent être comparés, le prince imposait ses conditions à ses traducteurs : les doctrines Chrétiennes, d'une part, et lorsqu'il s'agissait de la Bible ou de parties de la Bible, ils devaient les traduire à partir de la Vulgate, et lorsqu'il était impossible de le faire depuis celle-ci, quand les connaissances en latin des traducteurs n'étaient pas suffisantes, ils utilisaient des versions françaises ou espagnoles : celle de Bouhours pour le français et celles de Scio et de Torres Amat pour le castillan.

L'objet de ces traductions n'était donc pas l'édition. G. Lacombe nous dit : « il les faisait faire avant tout pour son usage personnel : il était, en effet, avide de comparaisons linguistiques. Toutefois, il en a publié une assez grande partie, les unes tirées à très petit nombre, dont deux ou trois à un seul exemplaire, les autres -et c'était le cas le plus fréquent- à deux cent cinquante exemplaires qu'il vendait à des prix fabuleux, sans doute pour décourager les profanes[23]»F.

En plus, pour les fins recherchées par Bonaparte, les traductions devaient être les plus littérales possibles. D'où les colères de certains traducteurs, qui se plaignaient d'avoir dû suivre de trop près le texte d'origine. Le prince lui-même donne son avis à ce sujet, dans une correspondance adressée à Antoine d'Abbadie : « Je vous remettrai alors... la seconde édition de ma traduction guipuzcoanne littérale (telles que j'entends les traductions bibliques destinées à l'étude comparative des langues)[24]»F.

Pour ses besoins linguistiques, et pour sa conscience d'éditeur, en plus, les notes des bas de pages et des marges sont pour lui superflues et répugnantes ; malheureusement pour les chrétiens qui en ont besoin pour la traduction de la Bible. Cela a du lui valoir plus d'une mauvaise surprise. La rupture qu'il eut avec le chanoine Inchauspé est la plus connue de toutes. E. Inchauspé, le souletin qui traduisit pour le prince San Mateoren Ebanjelioa (l'évangile de Saint Mathieu), Jolasak (Jeux) d'Iturriague, et Apokalipsia (L'apocalypse). Il présenta cette dernière avec de nombreuses notes, avec une condition : il devait la publier avec les notes, sur ordre de l'évêque de Bayonne. Certains passages d'une correspondance à A. d'Abbadie nous donnent le point de vue du prince à ce propos : « Mon amour-propre d'éditeur ne se prête pas très volontiers à l'exigence des notes. Je reconnais au P. Inchauspé un grand talent comme écrivain basque, mais quant à ses notes, comme celles de l'Apocalypse, je ne pense pas qu'on puisse les considérer comme un bon spécimen de théologie chrétienne éclairée... Je suis donc décidé de ne plus entendre parler de notes, et j'espère qu'un jour ou l'autre je trouverai quelque souletin qui voudra bien se charger de cette traduction sans se mêler en rien de l'impression ». Dans une autre, encore plus virulente et plus en colère, il dit : « Si vous pouviez déterminer le P. Inchauspé à laisser entièrement sur ma conscience le crime immense de faire imprimer la parole de Dieu en basque, il y aurait manière de s'arranger... mais quant aux notes je suis tout à fait déterminé de ne pas même en entendre parler[25]» F.

Les collaborateurs du prince

Comme nous l'avons déjà dit, aussi tôt arrivé au Pays Basque il constitua une équipe de collaborateurs :

1. Jean Pierre Duvoisin (1810-1891), d'Ainhoa. Il avait déjà traduit avant de rencontrer le prince, et il préparait un dictionnaire. Il fut le premier collaborateur du prince Bonaparte au Pays Basque.

2. Jose Antonio Uriarte (1812-1869) d'Arrigorriaga. Avant de traduire pour le prince il avait déjà publié quelques traductions en biscayen. Prêtre prédicateur, fin connaisseur des dialectes de Biscaye et de Guipúzcoa il fit les traductions pour le prince dans ces dialectes.

3. Klaudio Otaegi (1836-1890) de Zegama. Poète ayant remporté de nombreux prix. Il traduisit des doctrines et des passages de la Bible pour le prince en différents dialectes de Guipuzcoa : San Markosen ebanjelioa (l'Evangile de Saint Marc), Kantuen Kantika (Cantique des Cantiques) et quelques autres (1867).

4. Emmanuel Inchauspé (1815-1902) de Zunharreta. Directeur des études basques du prince Bonaparte. Il réalisa un certain nombre de traductions au souletin : San Mateoren ebanjelioa (L'évangile de Saint Mathieu) (1856), Jolasak (Jeux) d'Iturriague (1857), Apokalipsia (L'Apocalypse) (1858). Suite à des désaccords, comme nous avons pu le constater, ils mirent fin à leur collaboration.

5. M. Salaberry (1777-?), d'Ibarrola. L'auteur de la première traduction publiée par le prince.

6. Etxenike, Bruno (1820-1893), d'Urdax. Il traduisit pour le prince, San Mateoren ebanjelioa (L'Evangile de Saint Mathieu), Apokalipsia (L'Apocalypse), Ruten Liburua (Le Livre de Ruth) et Kantuen Kantika (Cantique des Cantiques).

7. Le prêtre bas-navarrais Casenave. Il traduisit San Mateoren ebanjelioa (l'Evangile de Saint Mathieu) et Jonasen profezia (La prophétie de Jonas).

8. Jose Antonio Azpiazu, de Segura. Il n'était pas traducteur mais correcteur de traductions au service du prince.

9. Juan Eloi Udabe, de Tolosa. Il n'a traduit qu'une partie de l'Evangile de Saint-Mathieu.

10. Mariano Mendigatxa, de Bidango. Il n'avait pas traduit de Bible.

11. Prudentzio Hualde (1823-1879), de Bidango. Il traduisit San Mateoren ebanjelioa (L'Evangile de Saint Mathieu) dans le dialecte de la vallée d'Erronkari (Roncal).

12. Pedro José Samper, de Jaurrieta. Il traduisit San Mateoren ebanjelioa (L'Evangile de Saint Mathieu) dans le dialecte de Saraitzu.

13. Le prêtre Ibarnegarai, il traduisit San Mateoren ebanjelioa (L'Evangile de Saint Mathieu)dans le dialecte de Baigorri.

14. Quand le chanoine E. Inchauspé cessa de traduire pour le prince, il fut remplacé par J. B. Archu (1811-1881) d'Altzürükü (Aussurucq). Il avait auparavant traduit plusieurs fables de La Fontaine éditées en 1848 et en 1852 : Uscara eta Franzes Gramatika, uskalherrico haurrentzat eguina (Grammaire basque et française pour les enfants du Pays Basque). Pour le prince, il traduisit Ruten Liburua (Le Livre de Ruth) et Kantuen Kantika (Cantique des Cantiques) et Jonasen Liburua (Le livre de Jonas). Ils furent publiés en 1886.

Parmi les traducteurs qui avaient œuvré pour les recherches linguistiques du prince Bonaparte, il ne faut pas oublier que le prince lui-même avait traduit quelques passages de la Bible (Salomonen Kantiken Kantika (Cantique des Cantiques de Salomon), Hiru haurren kantika labean (Cantique des trois enfants au four), etc.). en euskara, dans le dialecte guipuzcoan essentiellement.

De tous les collaborateurs du prince, les deux premiers, Duvoisin et Uriarte, méritent une mention particulière. Ils réalisèrent, en effet, les premières traductions intégrales de la Bible, celle du premier fut publiée en labourdin, mais celle du second ne fut pas publiée.

La Bible non-publiée de J. A. Uriarte

L. L. Bonaparte avait choisi deux dialectes pour traduire l'intégralité de la Bible, le labourdin et le guipuzcoan. Même si de nombreux passages et livres de la Bible ont été traduits dans de nombreux dialectes, ce ne fut pas le cas de la Bible en entier.

Pour la traduire au guipuzcoan, J. A. Uriarte avait choisi un moine biscayen : il ne parvenait pas à trouver, à cette époque, un écrivain capable de traduire l'intégralité de la Bible en guipuzcoan. Ce prédicateur du couvent de missionnaires de Bermeo, avait eu, lors de ses différentes missions à travers le Pays Basque, l'occasion de connaître différents dialectes, tel qu'il l'annonce dans une lettre adressée au prince quelques années plus tard : le navarrais de Valdorba, celui de la vallée du Deba, et de nombreuses zones de Biscaye...

Il se mit donc à la traduction de la Bible en 1859, avec ce biscayen et José Antonio Azpiazu comme correcteur. Pour l'heure, il avait déjà publié plusieurs livres et traductions : Marijaren illa edo maijatzeco illa (Le mois de Marie ou le mois de mai) (1850), en biscayen. Jesus Sacramentaduari eta Ama Doncella Mariari Visitac, d'Alfonso Maria Ligorio (1856), en biscayen. La traduction de Bula Ineffabilis du Pape Pie IX n'avait pas pu être publiée avant sa parution dans la revue Euskalerria.

A partir du moment où il commença à traduire pour le prince Bonaparte il publia, Jolasak d'Iturriague en biscayen (Londres 1857), San Mateoren ebanjelioa en biscayen (Londres 1857), Apokalipsia en biscayen (Londres 1857), Kantuen Kantika dans deux dialectes biscayens et un guipuzcoan (Londres 1858), San Mateoren ebanjelioa en guipuzcoan (Londres 1858) et Apokalipsia en guipuzcoan (Londres 1858).

Alors qu'il était en train de traduire la Bible, il traduisit aussi pour le prince, La doctrina cristiana traducida al vascuence, dialecto vizcaíno, vairedades de Marquina, Bermeo, Arratia, Centro y Ochandiano (La doctrine chrétienne traduite en basque, dialecte biscayen, variétés de Marquina, Bermeo, Arratia, centre et Ochandiano). Un seul exemplaire fut publié (Londres 1858).

L'œuvre majeure d'Uriarte ce fut la traduction intégrale de la Bible : Biblia edo testamentu zar eta berria Aita Fray José Antonio de Uriartec latiñezco Vulgatatic lembicico aldiz Guipuzcoacko euscarara itzulia Luis Luciano Bonaparte principeac eta don José Antonio Azpiazu guipuzcoatarrac lagunduric (Première traduction de la Bible ou de l'Ancien et du Nouveau Testament à partir de la Vulgate latine, par Père Fray José Antonio de Uriarte, aidé par le prince Louis Lucien Bonaparte et le guipuzcoan monsieur José Antonio de Azpiazu) (Londres 1859).

Alors qu'en même temps la Bible de Duvoisin était en train d'être publiée, celle d'Uriarte n'a pas été publiée hormis la Genèse, l'Exode et le Lévitique. Apparemment, Azpiazu s'ennuyant de corriger les traductions d'Uriarte avait jeté l'éponge. En effet, la partie qui a été publiée est celle du manuscrit qui comporte des corrections. La partie du manuscrit qui n'en comporte pas n'a pas encore été publiée. Il avait terminé son œuvre en début d'année 1868, et il mourut un an plus tard.

Les conditions que posait le prince Bonaparte pour la réalisation de ses traductions sont bien connues.

En ce qui concerne le dialecte de cette Bible, J. A. Uriarte, biscayen de naissance, avait pris pour modèles les guipuzcoans Lardizabal et Agirre d'Asteasu, le prince lui ayant demandé de la traduire dans le dialecte guipuzcoan. Lardizabal pour le lexique et Agirre d'Asteasu pour son utilisation du verbe.

Quant aux critères de traduction, celle-ci devra être la plus proche possible du texte d'origine. Lino Akesolo nous donne quelques précisions à ce sujet : « Sa traduction sera faite mot à mot, elle sera précise, très proche des mots des Livres Saints. Uriarte affirme plusieurs fois cette façon de concevoir la traduction. Lorsqu'il explique les bases de sa conception, il est encore plus précis. Par exemple, il dit qu'il fera tout son possible pour que les mots de la Vulgate latine et ceux en euskara se situent exactement à la même place : autant de mots en euskara qu'il y en a en latin ; là où se trouvent les mots en latin se trouveront ceux en euskara. Lorsqu'il traduit l'évangile de Saint Mathieu en biscayen, il procède ainsi ; et en traduisant l'intégralité de la Bible en guipuzcoan, il agira de la sorte. Ainsi, lorsqu'il voit écrit 'dicunt illis' dans la version latine il ne dira pas 'dirautse', mais 'esaten deutse'z : autant de mots en euskara qu'il y en a en latin. Il dit lui-même que lorsqu'il a traduit l'évangile de Saint-Mathieu en guipuzcoan il a suivi ce principe d'encore plus près que dans la version biscayenne. Il pensait à ce qui serait le plus utile au linguiste[26]» B.

Le titre lui-même dit que Uriarte à pris la Vulgate latine comme texte d'origine. Pour les passages difficiles, il s'appuie sur la traduction espagnole de Scio ou à défaut sur celle de Torres Amat.

La Sainte Bible de J. Duvoisin

Les deux cent cinquante deux exemplaires publiés par le prince Bonaparte de Bible Saindua edo Testament Zahar eta Berria (La Sainte Bible ou l'Ancien et le Nouveau Testament) de Duvoisin sont la seule traduction intégrale de la Bible en euskara au Pays Basque.

Son métier (garde frontière) l'avait amené à vivre dans plusieurs endroits du Pays Basque, et il en profitait pour recueillir les mots et particularités des différents dialectes.

De plus, avant de s'attaquer à la traduction de la Bible, et pendant, il avait appris le latin, le grec, le castillan, l'italien et quelques langues d'Orient, afin de les comparer à l'euskara, comme dit le père Haristoy dans son portrait de Duvoisin[27]: « Duvoisin avait déjà traduit avant la Bible. Dans sa jeunesse, il avait commencé à traduire, sans le terminer, le livre d'aventures de Fénelon qui venait d'être publié. Il avait aussi commencé à faire un dictionnaire basque-français, avec 12000 fiches, jusqu'au mot 'Oiergi' ».

La première traduction qu'il publia ce fut Aita San Ignacioren Egercicioen gaiñean afectoac de A. Kardaberaz, en labourdin, publié en 1856 sous le titre Liburu ederra.

C'est cette même année qu'il connut le prince Bonaparte, lorsque celui-ci se rendait pour la première fois au Pays Basque.

Travaillant pour Bonaparte, il traduisit Jolasak d'Iturriague en labourdin avant d'entamer la traduction de la Bible.

Nous avons déjà vu que ces traductions n'étaient pas destinées au grand public, mais uniquement aux linguistes, comme le reconnaît Duvoisin dans une correspondance : « Ce travail est destiné aux savants qui s'occupent aujourd'hui, en bon nombre et avec ardeur, de l'étude des langues »F

Le texte d'origine de cette Bible, tel qu'il est mentionné à la suite du titre, est la Vulgate latine : « Traduite pour la première fois en basque du Labourd par le Capitaine Duvoisin, à partir de la Vulgate latine. Publié par le prince Louis Lucien Bonaparte»BA

Quant au dialecte utilisé par Duvoisin dans sa traduction de la Bible, il faut dire que ce travail était d'avoir un échantillon fiable en labourdin. Ainsi le traducteur en est réduit à n'utiliser que ce dialecte, pas seulement le langage d'un lieu donné, mais bien de faire une synthèse de ce dialecte. Selon G. Lacombe : « Duvoisin n'a écrit dans le labourdin d'aucune localité déterminée : sa langue et son style sont admirables en général ; ils sont le produit d'un éclectisme d'ailleurs très cohérent, alors que souvent les écrivains basques usent d'un syncrétisme inter-dialectal assez ifâcheux[28]» F.

Concernant les critères de traduction, nous pouvons ici reprendre ce qui a déjà été dit à propos d'Uriarte : la volonté de traduire mot à mot. « Traduire aussi simplement, aussi exactement que possible, en suivant le texte pied à pied, et en restant fidèle à la lettre, autant que faire se peut. Comment, sans cela, comparer le mécanisme des deux langues ?F » dit Duvoisin[29].

Ruiz Arzallus, dans son article que nous avons déjà cité, n'est pas aussi clément et critique vivement la traduction mot à mot et la littéralité de Duvoisin : « Le rapport que Duvoisin a avec la Vulgate est évident : une entière et consciente liberté par rapport à la forme, et un relâchement évident quant au contenu [30]» C.

Afin d'éclairer certains passages du texte d'origine, Duvoisin eut recours à des versions françaises et espagnoles de la Bible et à des d'études bibliques ; il utilisa même les traductions basques faites avant lui. Ruiz Arzallus qui les a comparés nous dit : « Nous avons donc, d'un côté la Vulgate et ses descendances françaises : comme nous l'avons déjà vu, Duvoisin les utilise avec une certaine légèreté, surtout en ce qui concerne le style, et l'élégance est prioritaire par rapport à la fidélité à l'original. D'autre part nous avons les modèles basques -Harriet et Leizarraga- qui n'ont pas vraiment influencé Duvoisin : de simples œuvres qu'il a consultées lorsque la traduction posait quelques problèmes[31]» C.

La Bible de Duvoisin ne fut publiée entièrement après l'édition de Bonaparte qu'en 1972 par La Gran Enciclopedia Vasca en fac-similé (le prince Bonaparte l'avait publiée en cinq parties entre 1859 et 1865). De plus, l'édition du prince ne comportait que 51 exemplaires, y compris ceux destinés à l'étranger ; on ne peut donc pas dire que le nombre était suffisant pour avoir un effet quelconque dans la société basque. Depuis, elle a quand même connu des publications de certaines parties, la plus connue étant Ebanjelio Saindua euskaraz (Le Saint Evangile en euskara) édité en 1898 par le prêtre Haristoy. Cette édition comporte une note : « Ce livre est tiré d'un exemplaire de la traduction de M. Duvoisin, où l'auteur lui-même a fait plusieurs corrections. On remarquera que le savant linguiste, ayant tenu à faire une traduction littérale, du texte latin, n'a pu donner toujours à la phrase une harmonie qui la caractérise. Enfin, les observations qui nous ont été faites au point de vue de la clarté ou même de la doctrine nous ont fait ajouter ou remplacer quelques mots et modifier certains passages. Ces corrections ont été d'ailleurs rares[32]» F

Toutes les éditions bibliques qui ont été faites par des Associations Bibliques depuis 1868 sont basées sur la version de Duvoisin. Il en est de même pour les passages compris dans le livre Perlasco colier bat (Un collier de perles) publié en 1964. En revanche, ces éditions étaient faites par les protestants, et par conséquent ne connurent pas de succès.

D'autres traductions du XIXème siècle

Les travaux de Bonaparte eurent un écho surtout parmi les prêtres catholiques, et les publications des autres qui ont été faites à la même période et même avant l'ont été par les protestants.

Ainsi, F. Brunet avait traduit Jesu Cristoren Evanjelioa Juanen araura ( l'Evangile de Jésus Christ selon Jean) et Jesu Cristoren Evanjelioa Lucasen araura (L'évangile de Jésus Christ selon Luc). Le premier fut publié à Londres en 1870 et à Buenos aires en 1877 ; le second à Londres en 1880 et 1883.

Dans ces années, la souletine Anna Urruthy avait traduit et publié dans son dialecte Ebanjelio Saintia Jesus-Kristena, Jondane Johaneren arabera (Le Saint Evangile de Jésus Christ selon Saint Jean) (Bayonne 1873 et Orthez 1888) et Jondane Phetriren epitriak (Epîtres de Saint Pierre) (Bayonne 1873 et 1887).

Certains livres furent aussi publiés à partir de la traduction de Leizarraga dans ces années là.

Traductions du début du XXème siècle jusqu'à Olabide

Il a fallu attendre la fin du premier quart de ce siècle avant de voir paraître les premières traductions bibliques.

Afin de comprendre quelques caractéristiques des traductions bibliques en euskara de ce siècle, il faut prendre en compte les désaccords qui se produirent autour de l'orthographe de l'euskara à la fin du siècle précédent, sans quoi on risque de ne rien comprendre. A la fin du XIXème siècle les écrivains basques se retrouvent dans trois écoles du Pays Basque péninsulaire :

- Ceux qui se sont attachés à la tradition, très souvent contre leurs contemporains. Ce sont des successeurs de Larramendi, Kardaberaz, Mendiburu ou Iztueta.

- R. M. Azkue et les siens, que l'on considère comme des défenseurs de la tradition, mais que certains de leurs contemporains considéraient comme novateurs.

- L'école qui s'était constituée autour de S. Arana-Goiri qui marquera la voie vers plusieurs modes de purification.

En 1922 était publié Ruthen liburua (Le livre de Ruth) de l'expert biblique Erromal Galdos. Ce traducteur publia en 1936 à Rome Dabiden eres-abestiak en versions basque et latine à partir du texte d'origine en hébreu, avec quelques notes pour mieux comprendre la version basque. Quant à l'écriture, elle fait preuve d'une certaine purification, plus drastique dans les notes et les remarques que dans la traduction.

La traduction de José Zabala Arana (1894-1936) Aste Gurena euskaraz eta lateraz (La Semaine Sainte en euskara et en latin) fut publiée en 1924. Comme le montre le titre lui-même, il ne s'agit pas d'une traduction de la Bible au sens le plus strict, mais bien d'une traduction de textes liturgiques. Cela étant, parce qu'une bonne partie est constituée de traductions de la Bible, et parce qu'il s'agit du résultat d'une purification linguistique, cette traduction mérite d'être citée dans ces lignes. La traduction des Psaumes de David n'avait pas été achevée dans la revue Euzko Deya. Cet auteur publia d'autres œuvres dans son euskara très particulier.

A cette même époque(Zarautz 1959), suivant les mêmes critères de traduction, Manuel Arriandiaga (1876-1947) publia Goizparraik eta beldubaik egiña (Evangiles et faits des apôtres). Une partie de celle-ci fut publiée en 1936 : Matai Deunak-legezko Josu Kisto'gazko Goizparra. Arriandiaga a été considéré, parmi les fidèles d'Arana Goiri, comme celui qui créait le plus de néologismes. Sa traduction en est pleine, de sorte que personne ne peut la lire sans difficulté.

En 1925, l'hébdomadaire Argia publia le livre d'église Argi Donea. S'agissant de textes liturgiques on y trouve des passages de la Bible. Cette œuvre fut publiée en biscayen en 1935 traduite par le prêtre Eguzkitza dans ce dialecte.

Dans ce même esprit nous pouvons citer Bezperak (Vêpres) d'Arbelaitz, Urte guziko igande eta jaiegunetako Ebangelioak (Evangiles des dimanches et jours fériés) de P. Iraizoz publiés tous deux à Pampelune en 1932 ou encore, Yesu-Kristo Gure Yaunaren Bizia, lau Ebangelioetatik itzez-itz aterea (La vie de notre Seigneur Jésus Christ, tirée mot à mot des quatre évangiles) du même Iraizoz (Pampelune 1934). En plus de l'hebdomadaire Argia, dans le revue Jesusen Biotzaren Deya, entre 1927 et 1931, le jésuite Areitio publia Jesukristoren bizitza lau Ebanjelioetatik artu eta baten euskeralduta (La vie de Jésus Christ d'après les quatre évangiles et réunis en un seul en euskara). Même s'il n'a pas été publié, B. Garro nous a laissé une traduction de l'évangile concordé du cardinal Gomá, et plus tard, Oraingo Aste Santua (La Semaine Sainte aujourd'hui) (Tolosa 1957) de Luis Egia.

Pour la génération encore en vie actuellement il est une édition bien plus répandue : celle publiée en 1950 par N. Ormaetxea « Orixe » Urteko Meza-bezperak (Vêpres de l'année). Cette œuvre vécut en France pendant de nombreuses années après la guerre. Elle fut publiée en Belgique en euskara et en latin sur deux colonnes. Orixe utilise pour la traduction la méthode qui lui est caractéristique, la brièveté et la fermeté « l'euskara laconique ». La colonne basque est presque toujours plus courte que la latine.

Ce même Orixe avait commencé à traduire et à publier San Joanen Ebanjelioa (L'Evangile de Saint Jean) dans la revue Jesusen Biotzaren Deya. Ce travail n'a pourtant pas été achevé. Après la publication de la traduction d'Olaberria, en 1967, lorsque fut publié Itun Berria (Le Nouveau Testament) en guipuzcoan par Orixe-Kerexeta-Zugasti, la traduction des quatre évangiles était parue tel qu'Orixe l'avait faite, et le reste à partir de traduction en biscayen de J. Kerexeta et de celle guipuzcoan de A. Zugasti. En 1968 Orixe publie Salmudia (Psautier). En introduction de cette œuvre, adressée au lecteur, il fait quelques remarques sur le choix et la classification des psaumes ; il reconnaît que ces psaumes ont été traduits pour être chantés, et que dans la mesure du possible ils les a rédigés en vers en ayant recours à des rimes riches ou pauvres. Il faitde nombreuses remarques sur le texte : ces notes portent plus souvent sur la traduction elle-même que sur la compréhension du texte.

En 1947, le prêtre L. Leon (1896-1962) publia Jesu-Kristo Gure Jaunaren Ebanjelio Saindua (Le Saint Évangile de Jésus Christ Notre Seigneur). Une traduction complète agréable à lire, accompagnée de remarques, parfois même de certaines regrettables comme celle de Jn IV, 7 : « Une samaritaine vint alors chercher de l'eau, Jésus lui dit : " Donnez-moi à boire'' ». Et la remarque disait ceci « Les Samaritains étaient pour les Juifs mille fois moins que ce qu'étaient les Gascons pour nous les Basques[33]» BA.

R. Olabide : Itun Zâr eta Berria (l'Ancien et le Nouveau Testament)

C'est sans doute la traduction de la Bible en basque la plus controversée, quand bien même ell a été la plus lue pendant des années, surtout le texte de l'Ancien Testament.

Raimundo Olabide (1869-1942), était né à Gasteiz (Vitoria) et il était un nouveau bascophone : il avait appris l'euskara alors qu'il avait plus de vingt ans. L'œuvre d'Olabide comprend, en plus de la traduction de la Bible, d'autres traductions comme Loyola-tar Eneko Deunaren Gogo-Iñarkunak, Bilbao 1914 ; et Josu-Kristoren Antzbidea, Donostia 1920 et des travaux lexicographiques tels que Giza-soña, Tolosa 1917 et Giza-gogoa qui n'a pas été terminé.

Il publia en 1913 Itun Berria : l'intégralité du Nouveau Testament. Selon Orixe, la traduction était achevée en 1924[34]. Sa publication semble donc avoir pris du retard puisque l'introduction est datée de 1928.

Olabide avait le texte grec pour texte d'origine, bien qu'il se soit aidé de la Vulgate.

Aussitôt cette édition parue il reçut les critiques qu'il allait recevoir plus tard lors de la publication de l'intégralité de la Bible. Il y eut une vive polémique entre P. Iraizoz et Orixe. Le premier en dénonciateur de l'œuvre et le second en défenseur. Le premier reprochait à l'intéressé une mauvaise utilisation du lexique et la syntaxe. Orixe restait inflexible et défendait son lexique, mais reconnaissait qu'Iraizoz avait raison quant à la syntaxe.

Cette situation se reproduit en 1958 lorsque fut publie Itun Zâr eta Berria (Ancien et Nouveau Testament) d'Olabide. Olabide mourut en 1942, et c'est le jésuite Fr. Etxebarria qui se chargea de la préparation de la traduction pour sa publication. Dans certains passages il apporta des corrections au texte d'Olabide, parce qu'entre temps les textes canoniques avaient changé : les Psaumes de David furent modifiés en fonction de la nouvelle version latine réalisée par le pape Pie XII. L'introduction et les notes qui accompagnent le texte sont, elles aussi nouvelles, surtout en ce qui concerne l'Ancien Testament.

Cette édition suscita rapidement les critiques. Parmi toutes, celle de L. Mitxelena dans la revue Egan en 1959 mérite d'être signalée, puisqu'elle recueille les mérites et les défauts du travail d'Olabide[35].

Parmi les mérites, Mitxelena reconnaît à Olabide le fait d'avoir traduit directement à partir des textes d'origine : « La traduction d'Olabide est faite à partir des mots d'origine, pas du latin, et avec les connaissances actuelles en matière biblique[36]»B. Puis il vente l'attention et la précision de sa traduction : « De ce point de vue, parmi toutes les traductions basques, celle d'Olabide est longe princeps[37]»B.

Pour Mitxelena la base de l'euskara employé dans Itun Zâr eta Berria est le guipuzcoan : « Le langage d'Olabide, bien qu'il paraisse si hétérogène en surface, est au fond guipuzcoan, et même un guipuzcoan réduit et fermé... Et la morphologie, le cœur de la langue, est guipuzcoane et parfois même plus que cela... Surtout le verbe est guipuzcoan quelque peu modifié par analogie[38] »B

Lorsqu'il étudie l'écriture d'Olabide, comme Iraizoz quelques années auparavant, il étudie l'utilisation et l'origine du lexique. Il qualifie le langage d'Olabide de « langage d'essai », et pense que les travaux de Duvoisin, Urte, Uriarte, Larregi et Lardizabal, bien que si fifférents entre eux, comparés a ceux d'Olabide, semblent "jumeaux".

Les travaux lexicologiques cités plus haut vont démontrer pourquoi la syntaxe d'Olabide a été tant de fois rejetée par des chercheurs. Ils disent qu'Olabide connaissait le Diccionario Vasco-Español-Francés bien mieux que son auteur, R. M. Azkue. Il l'avait étudié et dépouillé plus d'une fois. C'est dans ce dictionnaire qu'il aurait pris les mots employés dans Giza-Soina. L'origine de cette activité, non pas de lexicographie, mais de recueil et d'amoncellement lexical, se situe dans une idéologie de pureté linguistique.

Cette volonté de pureté, quant au lexique, n'est pas de la même école que celle de Zabala-Arana ou Arriandiaga : il n'a pas recours à la facilité de la création de néologismes. Tous ceux qui ont étudié ses travaux s'accordent pour dire qu'il est rare de trouver chez lui des mots qui soient complètement nouveaux en euskara.

Selon Mitxelena, Olabide n'a pas de limite géographique ni historique dans la recherche des mots : « On trouve dans ce livre, par centaines, si ce n'est par milliers, des mots nouveaux, oubliés parce que très anciens on s'ils sont connus dans quelque recoin, ils n'ont cependent jamais été utilisés dans la littérature basque[39]» B. Parfois, Olabide utilise les mots d'une façon et avec un sens qui peut choquer les lecteurs bascophones actuels.

Une autre caractéristique de l'écriture d'Olabide est l'utilisation elle aussi sans limite des formes verbales contractées ou synthétiques ; là aussi une habitude des puristes, héritée d'Eleizadere sans doute. S'appuyant sur un exemple Mitxelena explique : « En utilisant les verbes synthétiques comme dans un essai, Olabide verse des tonnes de charbon sur la tête des lecteurs : "Taninkoaren emaria ba'zenezagu, ta 'idazu ur'; dasaizuna nor dan ba'zeneki, ur bizia zerorrek zeneskayoke ". Comme dans de nombreux autres passages on trouve des verbes courants, d'autres qui ont été utilisés et d'autres encore qui n'ont jamais été utilisés, empilés comme des loups et des brebis ensemble[40]» B

En tout et pour tout, Mitxelena fait deux reproches à la traduction d'Olabide : le premier c'est « d'être né au milieu des éprouvettes d'un laboratoire » et le second d'avoir cherché l'uniformité linguistique, le modèle linguistique non pas dans le passé mais dans le futur. « Les rêves basques peuvent entendre toute sorte de choses, mais ils ne diront jamais mot »B. On ne peut pas dire l'Olabide ce que Lacombe disait de Duvoisin :« produit d'un éclectisme d'ailleurs très cohérent...FZ

D'autres traductions

Citons en premier lieu les traductions de la Bible effectuées depuis 1960 par J. Kerexeta en dialecte biscayen : Jesu Kristo Gure Jaunaren Barri Ona (1960), Apostoluen Egiñak (Donostia, 1961), Alkartasun berria. Apostoluen egiñak eta idazkiak (1965), Salmutegia (1967), Lau ebanjelioak elkar artuta (1973) et enfin, Euskal Biblia (1976). Ces publications connurent un franc succès, surtout en Biscaye.

Une autre traduction qui mérite d'être citée, de par sa diffusion, est celle de F. Mendizabal annotée par J. Goitia et publiée en 1961 : Lau Ebanjelioak. Il est remarcable, même in basence d'une analyse de la fidélité de la traduction par rapport à l'original, son excellente qualité au niveau de la langue.

On pourrait citer comme traductions extraordinaires Apokalipsis de Manuel Zelaia à partir de la traduction en castillan de Torres Amat, et les passages de la Bible que Toribio Etxebarria a publiés dans le livre Ibiltarixanak.

Suite au Concile du Vatican II, de nouvelles traductions de la Bible sont lancées, en premier lieu pour la Liturgie : le psautier, le Livre des Ordres, et les livres de messe des bénédictins de Bellocq.

Celles-ci ont donc été réalisées après le Concile du Vatican II. Ce sont des textes de transition et complémentaires aux travaux de la Commission Liturgique Inter-diocésaine et de la Commission Inter-ecclésiastique pour la Traduction de la Bible.


Note : Cet article fut publié dans Senez, 7, 1988.

1. RUIZ ARZALLUS Iñigo : Notas sobre algunas traducciones vascas del Nuevo Testamento in Anuario del Seminario de Filología Vasca « Julio de Urquijo », XXX-3. Donostia 1987. Pages 709-723.

2. BARR James : The Typology of Literalism in Ancient Biblical Translations in Nachrichten der Akademie der Wissenschaften in Gottingen. Cité par Ruiz Arzallus, op. cit. page 711.

3. SAN MARTIN Juan : "La Biblia en euskara" in Boletín de la Real Sociedad Bascongada de los Amigos del Pays. Donostia. Année XXXVII - 1981. Pages 602-608.

C Ndt : Texte en castillan dans l'original (symbolisé par la lettre dans le reste du document).

4. SAN MARTIN, Juan, Ibidem. Enciclopedia General Ilustrada del País Vasco, Ed. Auñamendi, Donostia 1978. Article "Biblia"

5. ARTEMOS-SARRATEL : Diccionario histórico, cronológico, geográfica y universal de la Santa Biblia, 1ertome (Madrid, 1788) page 180. Cité par SAN MARTIN, Juan.

6. OMAECHEVARRIA, I : Euskera. Ed. Itxaropena. Zarautz, 1959, page 156.

7. VILLASANTE, L.: Historia de la Literatura Vasca. (2. éd.) Ed. Aránzazu, Oñati. 1979. Page 57.

8. Cité par LAFON, René : Le système du verbe basque au XVIe siècle. Ed Elkar. Donostia, 1980. page 59.

C Ndt : texte en italique repris tel qu'il est dans l'original.

BA Ndt : texte en italique en basque ancien dans l'original (symbolisé par BA dans le reste du document).

9. LARRAMENDI, Manuel : Diccionario Trilingüe, Castellano, Bascuence y Latín. Prólogo. Donostia 1853. Page XXXII.

10. LAFON, René : Ibidem. Page 63.

F Ndt : texte en français dans l'original (symbolisé par la lettre F dans le reste du document).

11. Citation de René LAFON. Ibidem, page 60.

B Ndt : texte en basque dans l'original (symbolisé par la lettre B dans le reste du document).

J Ndt : un basquisme du mot « cuves »

12. SARASOLA, Ibón : Historia social de la Literatura vasca. Ed. Akal. Madrid, 1976. Page 40.

13. JUARISTI, Jon : Literatura Vasca. Ed. Taurus. Madrid, 1987. Page 42.

14. VILLASANTE, L. : Op. cit. Page 58.

15. VILLASANTE, L. : Ibidem.

16. MITXELENA, L. : Historia de la Literatura Vasca. Ed. Minotaurio. Madrid. 1960. Page 49.

q Ndt : Sabbathoa (Samedi) selon Leizarraga par rapport aux différentes façons de dire samedi au Pays Basque. Actuellement en Biscaye et dans certaines parties du Guipuzcoa on dit « Sapatue ».

17. VILLASANTE, L. : Op. cit. Page 222.

18. LLEWELYN THOMAS, M. A. : The Earliest Translation of the Old Testament into the Basque Language. Introduction, Oxford, 1894. Page 10.

I Ndt : texte en anglais dans l'original (symbolisé par la lettre I dans le reste du document).

19. Ibidem. Page 18.

u Ndt : alaba ederra est une traduction mot à mot de belle fille, qui aurait dû se traduire par erraina

20. RUIZ ARZALLUS, I. : Op. cit. Page 713.

21. Ibidem. Page 720.

22. BILBAO, Jon : Eusko Bobliografia. T. VI. Ed. Auñamendi. Donostia, 1970, page 344.

23. LACOMBE, George : Les versions basques du Cantique des Cantiques. R.I.E.V., XV 2° (1924). Page 198.

24. Ibidem : page 200.

25. Ibidem : page 201

z Ndt : dirautse est la forme synthétique du groupe verbal esaten deuste. Elle est plus courante que celle-ci.

26. AKESOLO, Lino : Katolikoen euskerazko Bibli-itzulpenak Jaunaren deia, 1971, Page 92.

27. HARISTOY, Pierre : « Le capitaine Duvoisin et ses travaux », in Euskal Erria XXXII, 1985, page 401.

28. LACOMBE, G. Op cit. Page 200.

29. RUIZ ARZALLUS : Op. cit. page 721.

30. Ibidem : page 722.

31. Ibidem : page 723.

32. Murde DUVOISIN : Ebanjelio Saindua eskuaraz. P. Haristoy Ziburuko erretorak argitara emana. Pabe. 1898. Nota. Page vi.

33. Léon, L : Jesu-Kristo Gure Jaunaren Ebanjelio Saindua, Baiona, 1947. Page 293.

34. AKESOLO, L : Mende ontako gure Bibli-itzulpenak. Jaunaren Deia, 1971. Page 323.

35. MITXELENA, Luis : Olabide. Itun Zar eta Berria. Egan, 1959 (1-4), pages 85-94 in Mitxelenaren idazlan hautatuak. Ed. Etor, Bilbo, 1972. pages 341-353.

36. Ibidem. Page 342.

37. Ibidem. Page 349.

38. Ibidem. Pages 348-349.

39. Ibidem. Page 346.

40. Ibidem. Page 349.