L'armée canadienne cherche en vain des interprètes... francophones

2004 Février 4
L'armée canadienne cherche en vain des interprètes... francophones

L'armée canadienne recherche désespérément des interprètes francophones en Afghanistan, mais la réponse à ce jour est «non, merci...».

Voilà deux mois que le contingent canadien à "Kaboul"http://fr.wikipedia.org/wiki/Kaboul fouille pour trouver quelques douzaines d'Afghans qui pourraient assister les soldats francophones du Royal 22e Régiment de Valcartier, arrivés en relève de leurs frères d'armes.

«Je n'ai trouvé personne qui parle français, a déclaré le lieutenant Tim Button, responsable de recruter les interprètes. Quelqu'un s'est présenté en prétendant parler français, mais quand je lui ai parlé, il était évident qu'il ne parlait pas un mot de français.»

Pourtant, Kaboul compte quelques écoles privées françaises, en plus d'un département de français à l'université. Mais les diplômés ne veulent pas travailler avec l'armée.

«Il semble que ceux qui parlent français ne veuillent pas travailler avec nous.»

Quelque 36 interprètes parlant anglais travaillent déjà pour l'armée. Ils traduisent notamment en dari et en pashtoun quand les troupes sortent du camp Julien, la base canadienne. Ils gagnent mensuellement environ 400 $ US, sans compter le temps supplémentaire -un salaire faramineux comparativement au fonctionnaire afghan, qui reçoit environ 12 $ US par mois.

Quand le lieutenant Button a dû recruter des interprètes parlant anglais, il n'a même pas eu besoin d'annoncer l'offre et a reçu des boîtes remplies de candidatures. Au cours des deux derniers mois, il a informé des chefs religieux et ethniques de ses besoins, mais n'a reçu qu'un appel d'un Afghan qui a tenté l'imposture.

Certains interprètes qui travaillent déjà pour l'armée ont tenté de se recycler... en vain.

«J'ai appris quelques mots : "Ça va bien ? Oui, ça va, Comment allez-vous ?", a commenté Aurangzaib Sharifi, un Kabouli qui a appris l'anglais au Pakistan. Mais nous ne pouvons parler français. J'ai pourtant appris cinq langues, mais il n'y a peut-être plus d'espace pour une sixième...»

Quelques unités de Valcartier sont déjà installées au camp Julien. Ils devront probablement se débrouiller avec les interprètes anglophones. D'autres corps expéditionnaires, des Croates aux Espagnols, doivent déjà gesticuler et baragouiner l'anglais pour s'en tirer.

Dans une séance d'information, la moitié des soldats du 22e Régiment a demandé à ce que les propos de l'officier soient traduits en français.

Environ 60 % des nouveaux arrivants sont bilingues, selon l'adjudant Robert McCann, qui s'occupe des transports.

«Nous jumellerons les interprètes anglophones jusqu'à ce que nous en trouvions qui parlent français.»

L'adjudant affirme que le degré de bilinguisme va croissant selon le grade et l'âge, puisque l'armée offre des cours de langue.



Article publiée dans le journal Le Devoir.